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Hommes qui dansent.



A toi, mon frère en humanité,


Je viens t'inviter dans un espace où nous, les hommes, avons encore bien peu l'habitude de demeurer.


Approchons-nous doucement.

Cessons un instant de nous dissimuler derrière le confort de nos privilèges et osons enfin nous pencher avec sincérité sur cette blessure que nous portons depuis des siècles. Nos sœurs, les femmes ont entrepris de prendre soin de la leur. Quand assumerons-nous de contempler véritablement la nôtre ?

Car au fond, toi et moi le savons bien, depuis des temps immémoriaux, nous luttons pour étouffer un cri de souffrance qui, à force de négligence et de déni, devient monstrueux et nous conduit tout droit à la destruction.


Entrons dans cet espace, ô mon frère en humanité !

Ici, nous sommes les bienvenus.

Ici, nous n'avons rien à faire. Rien ni personne à conquérir, dominer ou posséder.

Ce combat n'est plus nécessaire. Nous pouvons lâcher les armes. Ici, elles ne nous seront d'aucune utilité.

Nous sommes en sécurité.


Essayons de ralentir à présent.

Notre corps, terre d'accueil de notre être, temple de notre âme, a été l'objet de tant de maltraitance ! Tel un esclave, nous avons exigé de lui toujours plus de force, de pouvoir, d'efficacité, au nom de la sacro sainte virilité, jusqu'à ce qu'intoxiqué, mutilé, fragilisé, il finisse par crier grâce, et vaciller.

Ici, permettons à notre corps épuisé de se reposer. De se déposer doucement jusque sur la terre ferme, au rythme de notre respiration encore hésitante.


Viens mon frère. Respirons dans cet espace.

Immobilisons-nous ensemble, à l'écoute du Silence, et offrons-nous le temps de ressentir.

Offrons-nous le temps d'être sensibles. Offrons-nous le temps de redevenir des hommes, des vrais, dotés de vulnérabilité.

Nous avons passé tellement de temps à massacrer nos parts les plus subtiles et délicates. Jusqu'à en perdre complètement l'accès. Pouvons-nous doucement et courageusement rouvrir la porte de la geôle dans laquelle nous avons emprisonné, ligoté, et massacré notre sensibilité tellement elle nous terrifiait ?

Ensemble, dévisageons la violence semée aux quatre coins de notre monde à force de bâillonner et contrôler l'expression sacrée de notre intériorité. Ensemble, plongeons dans les yeux terrifiés de cette violence et dénudons-la de ses atours enragés jusqu'à contacter son tendre cœur pétrifié.


Glissons dans cet espace, ô mon frère en humanité !

Allons à la rencontre de cette intense souffrance que nous avons revêtue d'un épais manteau de honte.

La domination de notre pulsion sexuelle qui régulièrement nous dévaste, telle une horde de barbares déchaînés violant et pillant tous les espaces vierges de notre sensibilité.

Toi et moi le percevons bien, malgré les apparences, c'est un véritable crime perpétré contre notre féminité.

En nous, le viol, chaque fois que nous nous laissons submerger aveuglément par nos pulsions sans parvenir à les recevoir dans la présence enracinée de notre être.

En nous, l'agression, chaque fois que nous ne nous laissons pas d'autre choix que de bander sur commande, pénétrer systématiquement, durer toujours plus longtemps et décharger tristement.

En nous, le meurtre, chaque fois que, perdus dans les méandres de notre mental affolé, nous nous tendons pour contrôler, dominer, posséder l'innocence, la beauté et l'insaisissable manifestation du Vivant, entretenant la séparation, la solitude et l'angoisse de nous En sentir coupé.


Cet espace t'attend, ô mon frère en humanité !

Ensemble, posons humblement un genou sur l'humus accueillant de la Terre Mère qui inconditionnellement, nous porte depuis le début de notre humanité.

Dans cet espace, enfin en sécurité, laissons couler nos larmes si longtemps retenues, et se remplir délicatement de cette eau notre cœur asséché.


Alors, notre corps jusque là rigide et apeuré, retrouvera sa pulsation d'origine, sa vibration unique, comme une invitation à danser.


Et peu à peu, nous deviendrons ces hommes qui dansent.

Nous danserons notre nature sauvage, puissante et fière et nous danserons notre sensibilité subtile, tendre et délicate.

Nous danserons la fougue qui nous pousse vers l'exploration de nouveaux horizons et nous danserons la détente et le relâchement au cœur de l'acceptation de nos limites.

Nous danserons la tendresse et la fermeté qui consolent et soutiennent notre enfant intérieur blessé, devenant pour lui le père qui nous a douloureusement manqué.

Nous danserons le bonheur de nous laisser émouvoir par la fragile beauté du monde et nous danserons notre engagement à le réenchanter, férocement déterminés.

Nous danserons le vertige de l'impuissance, du doute et de nos ignorances et nous danserons l'allégresse de nous laisser porter et envelopper par l'éternel Mystère.


Ô mon frère en humanité, homme qui danse, je viens t'inviter dans cet espace où nous pouvons dès à présent demeurer. Cet espace en toi. En moi. En nous.

Dans un tournoiement joyeux et amoureux, laissons-le se déployer jusqu'aux confins du monde nouveau auquel, déjà, nous appartenons.


Yannick Laval

15 juillet 2021


Vous trouverez tous les renseignements sur les groupes d'hommes (et aussi sur les groupes mixtes) sur ce site www.yannicklaval.fr

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